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Un Vaincu.

plus même croire au bien, — je livre ce récit d’une capitulation. Oui, les grandes choses se font encore, et elles sont encore comprises ; il y a encore au fond des cœurs un écho qui répond à tout appel généreux.

La nuit qui suivit la reddition de l’armée fut vraiment une nuit de paix. Les Sudistes mouraient de faim, on s’empressa de leur distribuer libéralement des vivres. Au lieu de les parquer à l’écart, ils furent aussitôt mêlés aux Nordistes ; toutes les tentes s’ouvrirent devant eux, ils furent traités comme des hôtes et non comme des prisonniers.

Certes, ce fut pour les vainqueurs une joie plus douce encore que le triomphe, que celle de secourir une si profonde détresse ; d’ailleurs, les adversaires pouvaient se respecter mutuellement. Les deux armées qui s’étaient combattues depuis quatre ans se connaissaient. Celle qui succombait sous des forces écrasantes avait les grands souvenirs qui adoucissent l’épreuve. — L’armée fédérale se rappelait ses sacrifices et son indomptable persévérance, il n’y avait