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Un Vaincu.

ton, le passage des troupes, les ravages des partisans, la détruisaient avant que le grain fût formé dans l’épi. Le blocus rigoureux des ports ne laissait pénétrer aucune denrée de l’étranger. Jusque-là, la Virginie avait pu tirer quelque subsistance de l’extrême sud, la marche victorieuse de Sherman, de l’ouest à l’est, coupa toutes les communications, et le théâtre de la guerre resta isolé du reste des États confédérés. La population virginienne, comme l’armée elle-même, eut à souffrir les plus dures privations.

Dès le 1er décembre, Lee, n’avait plus que pour neuf jours de vivres, et il fallut l’heureuse arrivée d’un petit navire, échappé aux croisières nordistes, pour sauver les troupes de la famine. Les couvertures, les vêtements qui, on se le rappelle, avaient déjà manqué les hivers précédents, étaient devenus plus rares que jamais, et cependant l’ennemi était si proche que le séjour des troupes dans les tranchées était obligatoire.

« Les soldats avaient cent vingt-cinq grammes de lard rance pour ration journalière, écrit un