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Un Vaincu.

Le 3 mai, l’armée fédérale s’ébranla, et, passant le Rapidan, se mit en devoir de traverser la Wilderness, ce même désert de broussailles et d’épines gigantesques sur la lisière duquel s’était livrée, en 1863, la bataille de Chancellorsville. Grant hâtait sa marche, il ne pensait pas que Lee osât l’attendre et la facilité avec laquelle il avait pu passer le fleuve, l’avait convaincu que l’armée des Confédérés devait être en pleine retraite. Le seul désir du général nordiste était de l’atteindre au delà des fourrés de la Wilderness, dans le large espace découvert qui s’étend de Chancellorsville à Frédéricksburg ; il savait trouver là un terrain où il ne perdrait rien de l’avantage du nombre ; un grand coup, frappé à propos, lui ouvrirait la route de Richmond et, bouillant d’espérance, tourmenté de la seule crainte que Lee ne se dérobât à sa poursuite, Grant pressait la marche de sa belle armée.

Le 5 mai, au moment où il allait sortir des fourrés épais dans lesquels il ne pouvait déployer un seul régiment, il se trouva tout à coup attaqué, et avec une vigueur extrême, sur toute sa ligne.