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Un Vaincu.

Qu’on se figure les souffrances d’une guerre civile de trois années, l’acharnement croissant des partis, les rancunes ardentes, les crimes, les vœux de vengeance ! Pendant la lutte américaine, au Nord aussi bien qu’au Sud, les populations entières, femmes, enfants, vieillards, et ce sera leur éternel honneur, ne faisaient qu’un avec l’armée de leur pays. Elles vivaient par le cœur avec elle, ne travaillaient que pour elle, s’enthousiasmaient de ses triomphes, et, au jour de l’épreuve, la retrempaient dans leur ardeur. Sans cette intime union du peuple et des soldats dans une commune pensée, la longueur de la lutte américaine serait impossible à expliquer.

Mais les plus belles médailles ont un revers. L’enthousiasme peut mener à l’exaltation, et le patriotisme des Sudistes s’était exalté jusqu’à l’injustice.

Une femme du Sud rappelait récemment ses souvenirs devant nous. Venue jusqu’à la frontière virginienne pour dire adieu une dernière fois aux officiers de sa famille, elle avait as-