Page:Boissier - L’Académie française sous l’ancien régime, 1909.djvu/25

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
9
l’académie française au XVIIe siècle.

réunion dont on lui faisait un tableau si séduisant ; il demanda si ceux qui la composaient (il faut ici reproduire les paroles du maître) « ne voudraient point faire un corps et s’assembler régulièrement, et sous une autorité publique[1] ».

La proposition fut d’abord mal accueillie. Tout le monde comprit que du moment qu’on allait « former un corps », c’est-à-dire une société régulière, avec des lois et des règles fixes, c’en était fait de l’aimable familiarité des réunions antérieures. Mais ce qui devait effrayer surtout, c’était de s’assembler « sous une autorité publique ». On pouvait croire que Richelieu avait l’intention de mettre la main sur la littérature comme il avait fait sur le reste, et tout le monde savait alors ce que pesait la main du premier ministre. « On me mande, écrivait Balzac, que c’est une tyrannie qui se va établir sur les esprits, et à laquelle il faut que nous autres, faiseurs de livres, nous rendions une obéissance aveugle. Si cela est, je suis rebelle, je suis hérétique, je vais me jeter dans le parti des barbares. »

Balzac s’effrayait trop vite et Richelieu n’avait

  1. Pellisson, ouvr. cit., éd. Livet, I, p. 13.