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prenaient, et lui-même avait longtemps donné d’autres exemples. Lorsqu’un peu tard il s’avisa de résister aux exigences de ses vétérans, il eut à soutenir des luttes terribles, dans lesquelles sa vie fut plus d’une fois en danger. De toute façon, la conduite qu’il tint alors avec ses soldats est une des choses qui lui font le plus d’honneur. Il leur devait tout, il n’avait rien de ce qu’il fallait pour les dominer, ni les qualités de César, ni les défauts d’Antoine ; et cependant il osa leur tenir tête et finit par les maîtriser. Il est bien remarquable que, quoiqu’il ait conquis son pouvoir uniquement par la guerre, il ait su, dans le gouvernement qu’il fonda, maintenir la prédominance de l’élément civil. Si l’empire, dans lequel il n’y avait plus d’autre élément de force et de vie que l’armée, n’est pas devenu dés cette époque une monarchie militaire, c’est assurément à sa fermeté qu’on le doit.

Il n’y a rien de plus simple que les rapports d’Auguste avec le peuple. Les renseignements que fournit l’inscription d’Ancyre à ce sujet sont tout à fait d’accord avec le discours de Mécène : il le nourrit et l’amusa. Voici d’abord le compte exact des sommes qu’il a dépensées pour le nourrir : « J’ai compté au peuple romain 300 sesterces par tête (60 fr.), d’après le testament de mon père, et 100 sesterces (80 fr.) en mon nom, sur le butin fait à la guerre, pendant mon cinquième consulat. Une autre fois, dans mon dixième consulat, j’ai encore donné 400 sesterces de gratification à chaque citoyen, de ma fortune privée. Pendant mon onzième consulat, j’ai fait douze distributions de blé à mes frais. Quand je fus revétu pour la douzième fois de la puissance tribunitienne, j’ai encore donné 400 sesterces au peuple par tête. Toutes ces distributions n’ont pas été faites à moins de 250 mille personnes. Étant revêtu pour la dix-huitième fois de la puissance tribunitienne, et consul pour la douzième, j’ai