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consentait à y venir, c’était pour rendre les convives témoins des scènes les plus fâcheuses. C’est sans doute un jour qu’elle avait été plus revêche et plus acariâtre encore qu’à l’ordinaire que Quintus composa ces deux épigrammes, seul échantillon qui nous reste de son talent poétique ;

« Confiez votre navire aux vents, mais ne livrez pas votre âme à une femme. Il y a moins de sûreté dans la parole d’une femme que dans les caprices des flots. »

« Il n’y a point de femme qui soit bonne ; ou s’il s’en trouve quelqu’une par hasard, je ne sais par quel destin une chose mauvaise a pu devenir bonne un moment. »

Ces deux épigrammes sont assez peu galantes, mais il faut les pardonner au mari malheureux de l’aigre Pomponia.

La vie politique de Quintus ne fut, pas plus brillante que sa vie privée n’était heureuse. Les positions qu’il occupa, il les dut au grand nom de son frère plus qu’à son mérite, et il ne fit rien pour s’en rendre digne. Après qu’il eut été édile et préteur, il fut nommé gouverneur de l’Asie. C’était une épreuve difficile, pour un caractère comme le sien, que d’être revêtu d’une autorité sans limites. Le pouvoir absolu lui troubla la tête ; ses violences, que rien ne contenait, n’eurent plus de bornes ; comme un despote de l’Orient, il ne parlait plus que de faire brûler et pendre. Il voulait surtout mériter la gloire d’être un grand justicier. Comme il avait eu l’occasion de faire coudre dans un sac et de jeter à l’eau deux parricides dans le bas de sa province, en visitant l’autre partie, il souhaitait lui donner le même spectacle, afin qu’il n’y eût point de jaloux. Il cherchait donc à se saisir d’un certain Zeuxis, personnage important, qui avait été accusé d’avoir tué sa mère et que les tribunaux avaient absous. À l’arri-