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entièrement renoncé aux dissipations de sa jeunesse, et que tout magistrat, tout homme politique qu’il était, il a continué jusqu’à la fin de mêler le plaisir aux affaires.

II

Mais Cælius n’a pas été seulement un héros d’aventures galantes, et il ne s’est pas contenté de la gloire frivole de donner le ton pour l’élégance des manières à la jeunesse de Rome. Il avait des qualités plus sérieuses. Grâce aux leçons de Cicéron, il était devenu vite un grand orateur. Peu de temps après qu’il se fut échappé de cette honnête tutelle, il avait débuté avec éclat dans une cause où il luttait contre Cicéron lui-même, et cette fois le disciple battit le maître. Depuis ce succès, sa réputation n’avait fait que grandir. Il y avait au forum des orateurs que les gens de goût admiraient davantage, et dont ils jugeaient le talent plus parfait ; il n’y en avait pas qu’on redoutât plus que lui, tant il était vif dans ses attaques et amer dans ses railleries. Il excellait à saisir le ridicule de ses adversaires, et à faire sur eux en quelques mots de ces récits ironiques et cruels qu’on ne pouvait plus oublier. Nous en avons conservé un que Quintilien cite comme un modèle du genre et qui fait bien connaître le talent de ce terrible railleur. Il s’agit, dans ce morceau, de cet Antoine qui avait été le collègue de Cicéron dans son consulat, et qui, en dépit de tous les éloges que lui prodiguent les Catilinaires, n’était qu’un médiocre intrigant et un grossier débauché. Après avoir, selon l’usage, pillé la Macédoine qu’il gouvernait, il avait attaqué quelques peuplades voisines pour se donner des titres au triomphe. Il comptait sur un succès facile, mais comme il s’occupait plus de ses plaisirs que de la guerre, il s’était fait battre honteusement. Cælius,