bientôt à son bourreau, marche volontairement à sa torture[1] !
Et alors le combat se précise et s’étend. Le magicien s’exalte.
Clos dans son cercle, où les noms sacrés veillent comme des sentinelles autour d’un fort, vêtu selon le rite, avec au front la calotte de plomb qui amorce les rayons tristes de Saturne, armé d’une ronce, d’un couteau, de morceaux de verre, de tisons rouges, — de sa haine surtout[2], — il attaque la manie, sur laquelle pèsent les signes des archanges victorieux. Placé dans la direction de la victime vivante, il l’abomine en se servant des psaumes ; il extrait des comminatoires menaces des prophètes les versets de colère qui firent s’écrouler les murs de Jérusalem. Le doux Jésus aussi apporte ses rares phrases courroucées, les apôtres leurs reproches ; et, pour mêler les poignards rouillés des superstitions aux haches frénétiques du culte, le sorcier éventre l’arsenal des grimoires d’où s’éparpillent, orduriers et sanglants, les mots barbares, absurdes, panthéistiques en qui dorment les venins concentrés des premiers prêtres, les terreurs des premiers vaincus
- ↑ Paracelse prétend même que tout le sortilège est là. Je ne le crois pas pour ma part, et il me semble qu’à l’envoûtement est nécessaire une prise de contact préliminaire, qu’il faut, pour communiquer, un lien dynamique sinon physique. Voici, à titre documentaire, l’opinion toute mystique de ce novateur : « Si on peint sur un mur une image à la ressemblance d’un homme, il est certain que tous les coups portes à cette image seront reçus par son modèle. L’esprit du modèle passe dans cette figure peinte… L’homme désigné subira donc tout ce qu’il vous agréera de lui infliger parce que votre esprit a fixé à ce mur l’esprit de cet homme. » (Chapitre ix, De Ente spirituum.)
- ↑ « Lis et amicitia in natura stimuli sunt motuum et claves operum ; hinc corporum unio et fuga. — La discorde et l’amitié dans la nature sont les stimulants des mouvements et les clefs des œuvres ; de là l’union ou la fuite des corps. » (Grande clavicule.)