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PRÉFACE.



Il n’y a pas de doute que l’étude de la langue française ne soit un des points les plus importants de l’éducation. Cependant, avouons le à la honte de notre siècle, il n’y a que trop de gens qui négligent l’art de bien dire ; on ne rencontre dans le monde, que trop de gens qui, loin d’avoir étudié une langue étrangère, ignorent jusqu’à celle de leur pays. Une telle négligence, un pareil manque d’instruction, me semblent ne pouvoir comporter aucune excuse. La langue des Racine, des Pascal, des Buffon, des Voltaire ne mérite-t-elle pas tous nos soins, toute notre application ? Elle est une des langues les plus belles, les plus harmonieuses de l’Europe ; elle est le langage d’un Peuple, qui, non moins grand dans la paix, que dans la guerre, appelle sur lui les regards, et commande l’admiration des deux mondes. Des Nations rivales s’empresseront d’étudier notre langue, ambitionneront l’honneur de la posséder, et le Français seul, indifférent sur ses propres intérêts négligera de l’apprendre ! D’où peut provenir un oubli aussi étrange de nos facultés intellectuelles ? Les livres élémentaires ne sont pas rares en France ; il n’y a peut-être pas de Nation qui ait écrit plus que nous sur les éléments du langage. Mais, dira-t-on, il règne, parmi nos Écrivains une telle diversité d’opinions, que ceux qui voudraient se livrer à l’étude de la science grammaticale, en sont détournés par le triste résultat que leur offre, pour prix de leurs longs travaux, l’incertitude des principes hasardés dans nos ouvrages de Grammaire, et contredits tantôt par les uns, tantôt par les autres. Cette assertion est rigoureusement vraie. Une foule de contradictions et de bizarreries se sont introduites dans notre idiome, et l’ont soumis à des entraves qui ajoutent aux