aisément, et que ces esprits avides de louanges ne digéreroient pas facilement une raillerie, quelque douce qu’elle put être. Aussi oserai-je dire, à mon avantage, que j’ai regardé avec des yeux assez stoïques les libelles diffamatoires qu’on a publiés contre moi. Quelques calomnies dont on ait voulu me noircir, quelques faux bruits qu’on ait semés de ma personne, j’ai pardonné sans peine ces petites vengeances au déplaisir d’un auteur irrité, qui se voyoit attaqué par l’endroit le plus sensible d’un poëte, je veux dire par ses ouvrages.
Mais j’avoue que j’ai été un peu surpris du chagrin bizarre de certains lecteurs, qui, au lieu de se divertir d’une querelle du Parnasse dont ils pouvoient être spectateurs indifférens, ont mieux aimé prendre parti, et s’affliger avec les ridicules, que de se réjouir avec les honnêtes gens. C’est pour les consoler que j’ai composé ma neuvième satire, où je pense avoir montré assez clairement que, sans blesser l’État ni sa conscience, on peut trouver de méchans vers méchans, et s’ennuyer de plein droit à la lecture d’un sot livre. Mais puisque ces messieurs ont parlé de la liberté que je me suis donnée de nommer, comme d’un attentat inouï et sans exemples, et que des exemples ne se peuvent pas mettre en rimes, il est bon d’en dire ici un mot, pour les instruire d’une chose qu’eux seuls veulent ignorer, et leur faire voir qu’en comparaison de tous mes confrères les satiriques j’ai été un poëte fort retenu.
Et pour commencer par Lucilius, inventeur de la