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faut, mais au contraire elle exige du poëte qu’il donne une plus grande preuve de son génie. Pour faire avec tant d’art « d’un vain pupitre un second Ilion, » quelles merveilleuses ressources d’esprit il a fallu ! Les Satires, les Épîtres, l’Art poétique sont admirables ; mais dans le Lutrin tout est de création, et si Boileau n’avait pas composé ce poëme, il n’aurait pas donné toute sa mesure. Nous aimons en littérature un mauvais exemple de ce genre, qui nous vaut un chef-d’œuvre.

C’est en 1667 qu’eut lieu cette fameuse querelle, et en tête de l’édition qui parut en 1713, deux ans après la mort de l’auteur, se lisent les lignes suivantes qu’il avait écrites lui-même :

« Le trésorier remplit la première dignité du Chapitre dont il est ici parlé ; il officie avec toutes les marques de l’épiscopat. Le chantre remplit la seconde dignité. Il y avait autrefois dans le chœur un énorme pupitre ou lutrin, qui le couvrait presque en entier ; il le fit ôter. Le trésorier voulut le faire remettre. De là arriva une dispute qui fait tout le sujet du poëme. »

Le prélat terrible qui figure au premier vers du premier chant, s’appelait Claude Auvry. Il passa du siège de Coutances à la dignité de Trésorier de la Sainte-Chapelle de Paris. Le chantre se nommait Jacques Barsin ; était fils du maître des requêtes La Galissonnière. L’antique chapelle, située dans l’enceinte du Palais de Justice, est la chapelle bâtie au temps de saint Louis et restaurée de nos jours par