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fera plaisir. » Passer de ce roi à un prince prodigue, et amoureux de la gloire que donnent les lettres, c’était comme un rêve pour tous ceux qui tenaient la plume. Boileau fut comblé, et il se montra reconnaissant. Il y avait d’ailleurs en France comme un culte de la royauté. Aimer et servir le roi, n’était pas seulement un devoir de conscience ; c’était une maxime d’honneur. Peut-être même était-ce la manière du temps de se montrer libéral, et de faire, comme on dit aujourd’hui, de l’opposition. Le peuple s’est insurgé d’abord contre la noblesse, et a fait alliance contre elle avec la royauté, jusqu’au moment où la noblesse ayant perdu toute sa force, le roi et le peuple se sont trouvés face à face. Au commencement de cette lutte, on était bien loin de penser dans la bourgeoisie, qu’on pût jamais dans l’avenir s’en prendre au pouvoir royal. On acceptait celui-là comme nécessaire et sacré, et l’on s’émancipait sur le pouvoir intermédiaire, qui gênait la royauté, en même temps qu’il opprimait le peuple. Ces sentiments étaient doublement naturels chez les poëtes, que les grands seigneurs tyrannisaient, et que le roi traitait avec familiarité. Ce n’est peut-être pas un paradoxe que de dire que Boileau était un libéral, un frondeur, selon l’expression du temps. Il louait le roi aux dépens de la noblesse. En religion, il ne déguisait point ses sympathies pour les jansénistes. Sympathiser avec une secte condamnée, c’était au moins de la hardiesse. Les plus grands courages n’allaient pas au delà. Il fallait être un abandonné