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NOTES DU LIVRE IV. 383

virtus angeliczü Cette expression se rencontre plus communément chez les écrivains ecclésiastiques que chez les auteurs profanes ; mais loin d’v trouver, à l’exemple des commentateurs, u11e preuve du christianisnfe de notre auteur, nous y voyons plutôt une nouvelle preuve de son paganisme. Chrétien, en effet, et chrétien du sixième siècle, il n’aurait eu garde de réunir dans une même proposition des idées aussi disparates. Une pareille confusion eût été considérée à bon droit par les théologiens ombrageux de l’époque comme un scandale et une hérésie. Ammien Marcellin, Symmaque l’épistolaire, et, selon toute apparence, Martianus Capella étaient païens. On trouve pourtant dans leurs livres bon nombre d’expressions créées ou revendiquées par les écrivains ecclésiastiques. Dans le conllit, si vif alors, des idées et des systèmes, ces expressions étaient devenues comme une monnaie courante dont l’empreinte première tendait de jour en jour à s’effacer. Au reste, et pour nous borner à la critique du mot qui nous occupe, nous savons par le témoignage de saint Augustin (Cité de Dieu, liv. IX, ch. xix, et liv. X, ch. 1), qu’en certains cas les philosophes platoniciens de son temps, et entre autres Labéon, se servaient du mot âiyveltot pour désigner les génies intermédiaires entre les hommes et la divinité. Saint Augustin proteste vivement contre cette prétendue synonymie entre les âiyyskot du cl1ristianisme et les ôafpovsç de Platon, et réfute les raisons qui l’avaient fait admettre par l”école d”Alexandrie. Quoi qu’il en soit, il n’en demeure pas moins établi que le mot âiyyslot faisait partie du vocabulaire philosophique. Proclus l’emploie fréquemment pour désigner de simples messagers de Dieu, et Jamblique lui reproche, non sans aigreur, cette intrusion dans la langue philosophique d’expressions empruntées à la théologie des Barbares : 06 yàp 6 rpérco ; oëtoç ti ; (lewpicxç, âlltôz Qapôaptwïlg âlafovaiag pscrôg, 1.. r. Ã. (Cf. J. Simon. — Histoire de l’éc0Ze d’/Alexandrie, t. H, p. 134.)

Reste pourtant à savoir quel sens Boèce donne à ce mot, Évidemment, il entend par la des êtres différents des démons, ou des démons d’u.ne espèce particulière, autrement sa phrase pécherait par tautologie. L’explication de cette difficulté nous est encore fournie par saint Augustin. Il nous apprend en eilet, dans sa réfutation d’Apulée et de Labéon (Cité de Dieu, ibid.), que les platoniciens distinguaient de bons et de mauvais génies, et que, quand ils voulaient désigner les premiers, ils les appelaient zùôociuovsg ou ëîwslon. Suivant cette delinition, Boèce, pa.r ces mots arigelica virzus, entend parler des démons bienfaisants, et c’est à bon escient, et conformément à la langue de son école et de son temps, qu’il emploie cette expression. Pour suivre de plus près le texte de notre auteur, nous avons traduit les mots latins par les mots français correspondants, quitte à en déterminer le sens dans une note.