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xiii
INTRODUCTION.

gine les violences, les rapines, les excès de pouvoir de tout degré et de toute espèce qui devaient chaque jour y exciter le trouble et y introduire le péril, et l’on comprendra quelle rude tâche ce devait être pour un magistrat intègre que de prétendre établir au sein d’une telle confusion le sentiment de l’équité, l’empire de l’ordre et le respect de la loi.

C’est cette tâche pourtant qu’avait entreprise Boèce, et qu’il poursuivit jusqu’au dernier jour, sans s’émouvoir des menaces et des cris de vengeance qui accueillaient ses actes de répression ou ses tentatives de réforme. Il nous apprend lui-même quels adversaires puissants il eut a combattre[1], et l’on est moins surpris de la catastrophe terrible qui termina sa vie, quand on voit la généreuse imprudence qu’il mit à la provoquer.

Le temps n’était pas venu pourtant où le ressentiment de ses ennemis pouvait éclater. Bien des années après son consulat, Boèce était encore en possession de l’estime, de l’admiration peut-être de Théodoric, et l’on peut croire que ce prince ne le sacrifia qu’à regret aux rancunes des Goths. En effet, Théodoric avait l’âme assez grande pour comprendre et pour apprécier tous les genres de mérite et de courage. Si les difficultés de sa position le rendaient quelquefois sourd aux plaintes de son généreux consul, il y déférait néanmoins assez souvent pour exciter la jalouse défiance des Goths, comme on le voit par les

  1. Consol., p. 23.