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le plus, des personnages avec lesquels ils se sentent quelque chose de commun, avec lesquels ils sympathisent, et surtout qu’ils comprennent. Je sais bien qu’il est une respectable minorité de lecteurs (de ce côté du Rhin, bien entendu) qui n’aiment que ce qu’ils ne comprennent pas. J’avoue que je ne me sens guère de penchant à les satisfaire ; pourtant j’essaierai quelque jour. Je pense qu’en me donnant autant de mal pour être obscur que je prends de soin habituellement pour être clair, je pourrai bien trouver la chose moins difficile qu’on ne croit.

Quant au style biblique et oriental, ce style où l’on jette les images à poignée, plus d’une douzaine d’écrivains ou d’orateurs saint-simoniens ont apporté à ce genre de pastiche un talent, une verve, une richesse d’imagination, qu’un prêtre, grand écrivain pourtant, est bien loin d’atteindre ; et de plus, ils en décoraient des conceptions bien plus neuves que la démocratie évangélique des millénaires et de toutes les sectes qui se sont armées de quelques paroles du Christ pour attaquer l’ordre social. Ce style convient à la foi vive, à l’exaltation religieuse. Il ne faut pas trop en abuser. Mais aujourd’hui on use et on abuse de tout ; le langage poétique et figuré se mêle à tout, et les feuilletons sont parfumés de poésie. Heureux temps, où le talent coule à pleins bords, et qui se plaint de sa stérilité, comme c’est l’usage de tous les temps !

Enfin, il se trouvera des critiques qui articuleront des griefs plus spéciaux : ils m’accuseront d’être encore trop monarchique, trop aristocratique, et de laisser debout le christianisme, la