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je serais charmée de vous voir de bonne foi en colère pour ce sujet-là. Mais je dis que pour être amoureux, il faut croire à quelque chose bien vivement, ne fût-ce que pendant un temps fort court. Il faut croire ou qu’on est aimé ou qu’on aimera toujours ; chimères sans doute, mais enfin point d’amour sans cela.

— Je vous avoue, Politée, que de telles chimères comme vous dites bien, détruites par l’expérience de chacun et de chaque jour, ne peuvent m’entrer dans la tête. J’ai toujours peine à croire à la durée d’un sentiment que le premier défaut de confiance, souvent la première sensation désagréable suffisent pour affaiblir, et qui, de découverte en découverte, finit par s’évanouir tout-à-fait. Je n’éprouve pas autant qu’un autre cet entrainement qui nous aveugle sur l’objet que nous aimons et sur nous-mêmes, qui nous inspire une foi entière et nous porte