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chiens. À cette vue, madame Britolle prend un bâton et se lève pour les chasser. Pendant qu’elle est occupée à les mettre en fuite, messire Conrad et sa femme, qui suivaient leurs chiens, arrivèrent près de la grotte. Je vous laisse à penser quel fut leur étonnement, quand ils virent cette femme, qui était devenue noire, maigre et velue. Britolle, de son côté, éprouva une surprise pour le moins aussi grande. Le gentilhomme fait taire et retirer ses chiens ; il s’approche de cette femme et la prie instamment de lui dire qui elle est, et ce qu’elle fait dans un lieu si désert. Elle ne se fit pas longtemps prier pour satisfaire sa curiosité et celle de son épouse, qui venait de lui faire les mêmes questions. Elle leur déclara ingénument son nom, sa qualité, et leur raconta toutes ses infortunes.

Le marquis, qui avait connu particulièrement son mari, fut vivement touché de ce récit ; il n’oublia rien pour lui faire abandonner la résolution qu’elle avait prise de finir ses jours dans ce désert. Il s’offrit de la ramener chez ses parents, ou de la garder chez lui jusqu’à ce que le sort lui fût plus favorable, en lui promettant de la traiter comme sa propre sœur. Mais, voyant qu’elle ne se rendait point à ses instances, il la laissa avec sa femme, persuadé qu’elle pourrait la déterminer plus facilement à accepter ses offres ; en attendant, il donna des ordres pour qu’on lui apportât des habits et de quoi manger.