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prétendu abbé était une femme, il lui rend aussitôt caresse pour caresse ; et, sans autre cérémonie, se met en devoir de lui prouver qu’il était, lui, véritablement homme. « N’allez pas si vite en besogne, lui dit le faux abbé en l’arrêtant ; avant de pousser les choses plus loin, écoutez ce que j’ai à vous dire. À présent que vous connaissez mon sexe, je ne dois pas vous laisser ignorer que je suis fille, et que j’allais trouver le pape pour le prier de me donner un époux ; mais je ne vous eus pas plutôt vu l’autre jour, que, par un effet de mon malheur ou de votre bonne fortune, je me sentis aussitôt éprise de vous. Mon amour s’est tellement fortifié, qu’il n’est pas possible d’aimer plus que je vous aime. C’est pourquoi j’ai formé le dessein de vous épouser de préférence à tout autre. Voyez si vous me voulez pour votre femme ; sinon, sortez de mon lit et retournez dans le vôtre. »

Quoique Alexandre ne connût pas assez bien la dame pour se déterminer si promptement, néanmoins comme il jugeait, par son grand train et par la qualité des gens qui l’accompagnaient, qu’elle devait être riche et de bonne maison, et d’ailleurs la trouvant fort aimable et fort jolie, il lui répondit, presque sans balancer, qu’il était disposé à faire tout ce qui pourrait lui être agréable.

Alors la belle s’assoit sur le lit ; et, dans cette attitude, devant une image de Notre-Seigneur, elle met un anneau au doigt d’Alexandre, en signe de leur foi et de leur mutuelle fidélité. Puis ils s’embrassèrent, se caressèrent, et passèrent