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Aucun n’en fixe les époques ; on ne connaît de bien positives que celles de sa naissance et de sa mort. On sait qu’il voyagea longtemps, qu’il parcourut les principales villes d’Italie ; mais on ignore en quel temps de son âge. Voici ce que nous avons recueilli de plus intéressant dans les différents auteurs qui ont écrit sa vie ou commenté ses écrits.

Après qu’il eut quitté la France, il se rendit à Naples, où il passa quelques jours. Là, se trouvant par hasard sur le tombeau de Virgile, il se sentit saisi d’un si profond respect pour ce grand poëte, qu’il baisa la terre qui avait reçu ses cendres. Le souvenir du plaisir qu’il avait éprouvé à la lecture de ses ouvrages réveillant son premier goût pour les lettres, il jura dès ce moment de renoncer entièrement à l’état qu’il avait d’abord embrassé par condescendance pour ses parents.

Il fit un second voyage à Naples ; et comme il était déjà connu par plusieurs ouvrages, il fut bien accueilli à la cour. Robert était alors sur le trône de Sicile ; et s’il faut en croire le Tassoni, Sansovino et quelques autres auteurs, Boccace devint amoureux et obtint les faveurs de la fille naturelle de ce prince. Un grave historien[1] assure qu’il brûla aussi du plus tendre amour pour Jeanne, reine de Naples et de Jérusalem, et que c’est d’elle-même qu’il a voulu parler dans son Décaméron sous le nom de Fiammetta ou Flamette. Ce qui est certain, c’est qu’il était né avec un penchant extrême pour les femmes ; qu’il les a aimées passionnément, et que l’habit ecclésiastique qu’il prit, avec la tonsure, vers l’âge de vingt-quatre ans, ne l’empêcha pas de leur faire publiquement la cour. C’est pour elles, pour les amuser, pour se les rendre favorables, qu’il composa ses Contes, ainsi qu’il en convient lui-même dans l’espèce de préface qu’il a mise à la tête de la quatrième Journée. Il eut plusieurs enfants de ses maîtresses ; une fille entre autres nommée Violante, qui lui fut chère, et qui mourut fort jeune.

Son goût pour la galanterie ne s’éteignit qu’à l’âge de cinquante ans. Il vécut depuis dans la plus exacte régularité, se repentant sincèrement de tous les égarements qu’il avait à se reprocher, et qu’il n’eût sans doute pas portés si loin, si les mœurs de son temps avaient été moins libres. Comme il n’eut jamais d’ambition, il passa la plus grande partie de ses jours dans la pauvreté ; car il avait vendu, pour acheter des livres, le peu de biens dont il hérita de ses parents. Il passa les dernières années de sa

  1. Antoine Ciccatelli, dans son Histoire des Papes, vie d’Urbain VI.