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Le mari, furieux de n’avoir pu ni tuer ni reconnaître son adversaire, n’a pas plutôt mis le pied dans sa chambre, qu’il crie comme un enragé : « Où es-tu, scélérate ? tu as beau éteindre la lumière, tu n’échapperas pas à mon juste courroux. » Il s’approche du lit, et, croyant se jeter sur la coupable, il assomme de coups la pauvre servante, lui meurtrit les épaules, la tête, le visage, et finit par lui couper les cheveux, lui disant des injures que l’honnêteté ne me permet pas de répéter. Cette misérable fille pleurait de tout son cœur ; et, quoique la douleur lui arrachât de temps en temps cette exclamation : Hélas ! je n’en puis plus ! sa voix était si entremêlée de sanglots, et le jaloux si transporté, qu’il ne reconnut point son erreur. Enfin, las de la battre et de l’injurier : « Infâme, lui dit-il en se retirant, ne pense pas qu’après une action de cette nature je te garde davantage chez moi. Je vais tout conter à tes frères et les prier de te venir prendre. Ils feront de toi ce qu’ils jugeront à propos. Pour moi, j’y renonce pour la vie. »

Il ne fut pas plutôt sorti, que madame Simone, qui avait tout entendu, rallume la lampe et trouve la servante dans l’état le plus déplorable. Elle la consola de son mieux, la reconduisit dans sa chambre, où elle lui donna tout ce qui était capable de la soulager, en attendant qu’elle pût la faire traiter en cachette par les médecins ; et elle la récompensa si grassement qu’elle se fût laissé battre encore une fois au même prix. Après avoir donné les soins nécessaires