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sur les plaisirs de la nuit, s’ils n’eussent craint d’être surpris par les domestiques. Ils se séparèrent ensuite, pour vaquer à leurs affaires, attendant l’heure du rendez-vous avec une égale impatience.

Cependant Egano, revenu fatigué de la chasse, se hâte de souper et se couche de bonne heure pour se délasser. La belle ne tarde pas à le suivre, et laisse, comme elle l’avait dit, la porte de la chambre ouverte. Hannequin s’y rend à l’heure indiquée. Il entre, ferme doucement la porte, s’approche de la dame, et introduit avec précaution sa main sur sa belle gorge. Béatrix, qui ne dormait pas, saisit cette main des deux siennes, la serre amicalement, et se trémousse si fort qu’elle réveille son mari. « Hier au soir, lui dit-elle, je ne voulus vous parler de rien, parce que je vous trouvais tout fatigué ; mais dites-moi à présent, je vous prie, lequel de tous vos domestiques vous trouvez le plus honnête, le plus fidèle, et lequel vous aimez le plus. — Pourquoi cette question, ma chère amie ? répondit Egano ; ne sais-tu pas qu’Hannequin est celui que j’aime le plus, et en qui j’ai mis toute ma confiance ? Mais pourquoi me demandes-tu cela ? » Notre amoureux, s’entendant ainsi nommer, fit plusieurs mouvements pour retirer sa main, ne doutant pas que sa maîtresse ne voulût le trahir ; mais la belle la tenait si bien qu’il ne lui put échapper. « Voici ce dont il s’agit, continua-t-elle : je croyais comme vous, qu’Hannequin méritait votre estime et votre confiance plus que personne, mais je suis assurée à présent du contraire. Auriez-vous imaginé qu’aujourd’hui, pendant que vous étiez à la chasse, il ait eu l’audace de me parler de galanterie, de me dire qu’il m’aimait, et de me faire des propositions ? rien n’est plus certain ; et, pour vous en convaincre par vos propres yeux, j’ai feint d’entrer dans ses vues, et je lui ai donné rendez-vous au jardin, sous le pin, où il doit se trouver vers une heure après minuit. Vous sentez bien que mon intention n’est pas d’aller l’y rejoindre. Mais si vous voulez faire une bonne œuvre, et vous convaincre de la perfidie de votre intendant, prenez une de mes jupes et une de mes coiffes, et allez l’attendre : je suis sûre qu’il ne manquera pas de vous aller joindre. — Il est trop important pour moi de me détromper, dit le mari, pour que je laisse échapper cette occasion. J’y vais tout de suite. » Et cherchant à tâtons une jupe et une coiffe, il les ajusta le mieux qu’il put, et s’en alla au jardin, où il attendit Hannequin sous l’arbre désigné pour le rendez-vous. À peine fut-il hors de la chambre, que sa femme se leva et courut fermer la porte. Dieu sait si Hannequin, qui avait pensé mourir de peur et fait mille vains efforts pour s’échapper des mains de sa maîtresse, qu’il soupçonnait de perfidie, dut être ravi d’un pareil dénoûment. Béatrix s’étant remise au lit, l’amant se déshabille sans autre cérémonie, et se couche auprès d’elle avec une joie qui ne peut s’exprimer. Après avoir goûté des plaisirs que l’amour seul peut apprécier, la belle, jugeant qu’il était temps que son amant dénichât : « Lève-toi,