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emparent. Il eût été d’autant plus facile au frère Oignon de persuader au peuple de cet endroit que cette plume avait appartenu aux ailes de l’ange Gabriel, que les perroquets étaient alors peu connus : le luxe d’Égypte n’était point encore passé en Toscane, comme il y est venu depuis, et où il fait tous les jours tant de progrès pour le malheur de l’État. Mais quand ces sortes de plumes auraient été connues de quelques personnes, il n’est pas moins vrai qu’il eût été aisé au moine de faire accroire aux habitants de ce canton que celle-là avait appartenu à l’ange Gabriel. Non-seulement les oiseaux rares n’y étaient point connus, mais je suis persuadé qu’on n’y avait jamais entendu parler de perroquets. La pure simplicité des mœurs anciennes régnait encore parmi eux.

Après que les deux jeunes gens eurent pris la plume, pour ne pas laisser la boîte vide et mieux surprendre le frère quêteur, ils s’avisèrent de la remplir de charbons qu’ils trouvèrent dans la cheminée.

Ceux et celles qui avaient entendu l’avertissement de frère Oignon, ne furent pas plutôt sortis de la grand’messe qu’ils se hâtèrent d’arriver chez eux pour en porter la nouvelle à leurs amis, parents et voisins. L’heure arrivée, on accourt en foule au lieu du rendez-vous. Quand le moine eut dîné, et qu’il eut pris une heure de repos pour mieux digérer, instruit de la multitude de paysans qui l’attendaient avec impatience, et dont une partie s’étaient rendus au château pour l’engager à venir plus tôt, il envoya dire incontinent à Gucchio Balena de sonner