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longtemps, se réveilla un peu avant le jour, le corps brisé, moulu, et la tête étourdie. Il ouvre les yeux, et ne voyant rien, il tâtonne et il étend les bras. Se trouvant dans une caisse, il ne sait s’il dort encore ou s’il veille. « Où suis-je donc ? Qu’est-ce que ceci ? disait-il en lui-même. Je me souviens fort bien que j’étais hier dans la chambre de ma bonne amie, que je m’endormis sur un coffre ; et, Dieu me pardonne, m’y voilà à présent dedans, si je ne me trompe. Qu’est-ce que cela signifie ? serait-il arrivé quelque accident ? le chirurgien ne serait-il point de retour ? sa femme ne m’aurait-elle pas caché ici pour me soustraire à sa jalousie ? » Cette pensée l’engagea à se tenir tranquille, et à écouter s’il n’entendrait pas quelque chose. Cependant il n’était rien moins qu’à son aise ; la caisse était petite et étroite ; il s’était tenu si longtemps dans la même attitude, que le côté sur lequel il était couché lui faisait beaucoup de mal. Pour soulager sa douleur, il voulut changer de situation et se mettre sur l’autre côté. Il le fit si lestement, que donnant des reins contre un des panneaux du coffre, qui n’était pas en lieu uni, il le fit d’abord pencher, et par un second mouvement, le renversa sur le plancher. Le bruit de la chute fut assez grand pour éveiller les femmes, dont le lit était fort près. Elles furent saisies de frayeur, sans néanmoins oser dire mot. Roger, qui sentit que la caisse s’était ouverte en tombant, et croyant qu’il valait mieux, en cas de malheur, être libre qu’enfermé, sortit tout doucement de cette étroite prison. Ignorant le lieu où il est, il va, tâtonnant çà et là, dans l’espérance de trouver quelque porte par