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jeune homme n’est point allée. Il vaut mieux vous consoler et soulager l’âme de Gabriel par vos prières et vos bonnes œuvres, si elle en a besoin. Pour ce qui est de la sépulture, cela ne doit pas vous inquiéter. Il importe peu en quel lieu on soit enterré, pourvu qu’on le soit. Nous enterrerons votre amant dans le jardin ; personne n’en saura rien, puisqu’on ignore qu’il y soit venu. Nous pouvons aussi le porter dans la rue ; les premiers qui l’y trouveront ne manqueront pas d’en avertir ses parents, qui se chargeront du soin de le faire enterrer. » La jeune veuve, tout affligée qu’elle était, ne laissait pas d’écouter la servante. « À Dieu ne plaise, répondit-elle en sanglotant, que je souffre qu’un amant qui m’a été si cher, qu’un mari qui m’aimait si fort, soit enterré comme un chien, ou jeté dans la rue comme une charogne ! Il a eu mes larmes, et je veux qu’il ait celles de ses parents, s’il se peut. Je sais ce que nous avons à faire. » Elle lui donna ordre aussitôt d’aller prendre une pièce de drap de soie qu’elle avait dans son armoire, et la lui ayant apportée, elles enveloppèrent le mort de ce drap, après avoir fermé ses yeux, et avoir mis sous sa tête un petit carreau. Andrée dit ensuite à sa femme de chambre : « J’ai encore besoin de ton secours, ma chère amie. La maison de Gabriel n’est pas fort éloignée, nous pouvons l’y porter aisément ; nous le placerons sur le seuil de la porte ; on ne manquera pas de le recueillir quand le jour paraîtra. Ce ne sera pas sans doute une grande consolation pour ses parents ; mais c’en sera une grande pour moi de lui voir rendre les derniers devoirs. » Après ces mots, elle se jeta de nouveau sur