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sans blesser ses préjugés, ni lui faire perdre la bonne idée qu’elle a de sa religion et de sa vertu. Dans cette vue, il lui fait plusieurs questions et voit, par ses réponses, qu’elle est tout à fait neuve, et qu’elle n’a pas la moindre idée du mal. Convaincu de sa simplicité, il forme alors le projet de couvrir ses désirs charnels du manteau de la dévotion, et d’ériger en acte de ferveur et de piété l’œuvre par laquelle il espère de les satisfaire. Il commence par lui dire que le diable est le plus grand ennemi du salut des hommes, et que l’œuvre la plus méritoire que des chrétiens puissent faire est de le mettre et remettre en enfer, lieu pour lequel il est destiné. « Et comment cela se fait-il ? dit la jeune néophyte. — Tu le sauras tout à l’heure, ma chère fille, reprit père Rustique ; fais seulement tout ce que tu me verras faire. L’ermite se déshabille aussitôt, et le petit ange d’en faire autant. Quand ils sont tout nus l’un et l’autre, Rustique se met à genoux, et fait placer la pauvre innocente vis-à-vis de lui, dans la même situation. Là, les mains jointes, il promène ses regards sur ce corps d’albâtre, qu’on eût dit qu’il adorait, et il a toutes les peines du monde à retenir les mouvements de son impatiente ardeur. Alibech, de son côté, le regarde tout étonnée de cette manière de servir Dieu, et apercevant au bas de son ventre