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Le marchand ayant terminé les affaires qui l’appelaient à Rhodes, et désirant revoir sa patrie, dont il était absent depuis longtemps, se disposa à retourner en Chypre. Il demanda à la Sarrasine si elle était dans l’intention de l’y suivre. « Très-volontiers, lui répondit-elle, pourvu que vous me promettiez de me traiter comme votre sœur ; vous le devez à la mémoire de votre ami. » Le Cyprien lui promit de faire tout ce qu’elle voudrait. « Afin même de vous mieux garantir de toute insulte, ajouta-t-il, je vous ferai passer pour ma femme. » S’étant embarqués sur une caraque de Catalans, on leur donna une petite chambre sur la proue. Ils avaient demandé d’être logés dans la même pièce, afin de ne pas démentir, par leur manière de vivre, ce qu’ils avaient avancé. Pour mieux éloigner les soupçons, ils couchèrent dans le même lit, tout petit qu’il était. Le diable les attendait là, pour les amener à ce qu’ils n’avaient point prévu lors de leur départ. Encouragés par l’obscurité, par l’occasion qui ne pouvait être plus commode, et excités par la chaleur du voisinage, qui, comme on sait, communique des forces plus que suffisantes pour exciter les désirs, ils oublièrent insensiblement les promesses qu’ils avaient faites l’un et l’autre au jaloux Antioche. Ce ne furent d’abord que de légères agaceries. On en vint aux caresses, et des caresses à ce que vous devinez aisément.