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doux sourire, des joues roses de sa chère Barounka, au temps où la jeune fille dormait encore dans son petit lit ! Ces larmes de la jeunesse n’étaient que de tendre rosée ; elle ne troublaient point.

Grand’mère sentait bien que sa vie touchait à son dernier déclin ; c’est pourquoi elle mit tout en ordre, comme une bonne et sage ménagère qu’elle était. Elle commença par se réconcilier avec le bon Dieu et avec les hommes ; puis elle fit le partage de son petit avoir. Chacun reçut quelque chose en souvenir. Elle avait pour tous ceux qui venaient la voir une bonne parole, et un regard particulier qui les accompagnait, lorsqu’ils la quittaient. Le jour que la princesse, accompagnée du jeune fils d’Hortense, vint la visiter, son regard les suivit longtemps, comme si elle savait qu’elle ne les rencontrerait plus dans ce monde. Il n’y eut pas jusqu’à ces muettes faces de ses bons chiens, et des chats même, qu’elle ne voulut encore revoir.

Elle les caressa et laissa Sultan lui lécher la main. « Regardez-les, disait-elle à Adèle et aux deux filles de service : tout animal est reconnaissant envers qui lui fait du bien. » Elle rappela Ursule à part, pour lui faire cette recommandation : « Quand je mourrai, — et je sais que c’en sera bientôt fini de moi, car j’ai rêvé cette nuit que Georges est venu me chercher, — eh bien ! aussitôt que je serai morte, n’oublie pas de le dire aux abeilles, pour qu’elles ne meurent pas. Les autres l’oublieraient peut-être. « Grand’mère savait bien qu’Ursule le ferait par la raison qu’elle croyait, elle, ce que les autres ne croyaient point ; puis, avec la meilleure volonté d’exécuter cette re-