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paisible vallée, pour aller chercher le bonheur ailleurs, et de même, aussi, que les graines, transportées par le vent, ou emmenées par les eaux, vont poser, sur d’autres rivages, et en d’autres prairies, le fondement de leurs racines.

Grand’mère ne quitta pas la petite vallée où elle avait trouvé une seconde demeure. D’un regard d’âme tranquille, elle considérait comment tout croissait et fleurissait autour d’elle, se réjouissant du bonheur de son prochain, consolant les affligés, leur venant en aide selon son pouvoir, et quand ses petits-enfants la quittèrent l’un après l’autre, s’envolant comme les hirondelles de-dessous son toit, elle les suivait des yeux mouillés de larmes, et pour se consoler, se disait : « Dieu m’accordera peut-être de les revoir ! Et ils se revoyaient. Ils revenaient, tous les ans, voir la maison paternelle, et leur vieille grand’mère les regardait de ses yeux brillants ; les garçons lui faisaient des tableaux, peints souvent avec une imagination ardente, de leur vie au milieu du monde ; ils étaient heureux de l’entendre, ou approuver leurs plans, ou pardonner à des fautes de jeunesse dont ils ne savaient pas lui faire un secret ; et lors même qu’ils n’en tenaient pas assez de compte dans la pratique, c’était toujours avec plaisir qu’ils écoutaient les conseils de son expérience, et qu’ils respectaient sa parole et sa manière. Devenues grandes, les jeunes filles lui confiaient leurs secrets, leurs rêves, leurs soupirs, sachant bien qu’avec de l’indulgence ils trouveraient, auprès d’elle, une parole qui les réconforterait. Ce fut ainsi que la fille du maître-meûnier, Marie, trouva son refuge, pour sa