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à la ronde les chaises pour les fileuses, à qui grand’mère préparait chaque veillée un panier rempli de poires et de prunes sèches à manger en filant. Comme les enfants attendaient avec impatience que la porte s’ouvrit pour l’entrée des fileuses. Car grand’mère ne commençait ses récits qu’après qu’elles avaient chacune leurs places. Dans la journée elle chantait les cantiques affectés au temps de l’avent.

Tant que les enfants ne connurent pas assez bien grand’mère, non plus que les bons et les mauvais moments, ils pensèrent qu’elle devait toujours et sans fin s’épuiser à leur raconter des histoires. Mais elle eut bientôt mis fin à leurs exigences. Elle le fit en leur parlant d’un berger, qui avait trois cents brebis, qui, après les avoir conduites au pâturage, arriva auprès d’un petit pont si étroit, que les brebis ne pouvaient passer qu’une à une. « Eh bien ! il nous faut à présent attendre, qu’elles soient toutes passées, » dit-elle ; et elle gardait ensuite le silence. Et quand un moment après les enfants demandèrent : « Grand’mère sont-elles déjà passées ? » Elle leur répondit : « Mais qu’est-ce que vous voulez ? Ça durera bien deux heures encore. » Les enfants comprirent bien ce que cela voulait dire. Une autre fois elle commença d’une autre manière : « Allons, dit-elle, puisque vous persistez, je vais vous raconter quelque chose. Vous imaginez-vous que j’ai soixante-dix-sept poches, et dans chacune une autre histoire ; de quelle poche désirez-vous entendre l’histoire ? » — « Soit de la dixième ! » s’écrièrent les enfants. — « Eh bien, je veux nous raconter l’histoire qui est dans la dixième poche : Il y avait un roi qui avait au