Page:Božena Němcová Grand-mère 1880.djvu/191

Cette page n’a pas encore été corrigée
— 181 —

« En voilà un de rusé ! » dit grand’mère.

« Et c’est comme ça, grand’mère ; ces messieurs vous en content tant que les oreilles en sonnent ; et ce serait une sottise de les en croire ; pour moi, j’oublie tout de suite un pareil langage. Mais cet italien a soulevé en moi jusqu’au dégoût. Nous étions l’autre jour occupés à râteler dans la prairie, Mila y vint par hasard. (Et grand’mère de sourire à ce mot de hasard) — Nous parlions de différentes choses, et je lui disais aussi, combien cet italien nous était à charge.

« Sois tranquille, dit Mila, je ferai en sorte qu’il n’aille plus vous importuner. — Mais ne fâchez pas mon père, lui dis-je ; car je connais ces jeunes gens de Zernov, ce sont des diables renforcés. Hier soir l’italien arriva comme à l’ordinaire ; mais presque aussitôt après lui accoururent à l’auberge d’autres jeunes gens. Ils étaient quatre, parmi lesquels Mila et son ami Thomas. Je crois que vous connaissez Thomas ? C’est un bon finaud — qui va épouser Anna Tichanek, ma meilleure amie. J’étais aussi joyeuse de les voir entrer que si l’on m’avait donné de quoi avoir une robe. Je les servis de bon cœur, et en portant une santé à chacun d’eux. L’italien faisait une mine renfrognée, car je ne bois jamais à sa santé, quand il me présente son verre de bière. Mais qui peut avoir foi en lui ; il pourrait m’ensorceler. Ces jeunes gens s’assirent à une table et se mirent à jouer aux cartes ; mais ce n’était qu’une feinte, et une occasion pour eux de ridiculiser l’italien.

Un des garçons dit ! « Regardez il a l’air d’un hibou. » Et Thomas y répondit : « J’attends toujours