Page:Božena Němcová Grand-mère 1880.djvu/19

Cette page n’a pas encore été corrigée
— 9 —

qui leur répondait dans la langue allemande que tous comprenaient. Grand’mère espérait qu’avec le temps, elle et lui finiraient par se comprendre ; elle se résolvait, jusque-là, à s’en tirer comme elle le pourrait.

Sa fille avait failli n’être point reconnue d’elle : ce n’était plus cette jeune et gaie paysanne qu’elle avait eue, autrefois, toujours à ses côtés ; c’était une dame qui parlait peu, mais qui pensait davantage ; toujours bien mise, et avec de belles et nobles manières. Non, ce n’était plus là sa Thérèse ! Elle eut bien vite remarqué que la vie domestique de sa fille ne ressemblait en rien à celle à laquelle elle avait été jusque-là habituée. Les premiers jours, elle fut comme illusionnée de joie et de surprise ; mais, peu à peu, elle se sentit mal à l’aise dans sa nouvelle demeure ; et, s’il n’y avait pas eu là ses petits enfants, elle s’en fût retournée bien vite à sa chaumière.

Ce n’était point que dame Thérèse, malgré ses quelques caprices de grande dame, ne fût bonne et sage, au point de n’en faire souffrir personne. Madame Proschek aimait beaucoup sa mère, et n’eut pas été contente de la voir s’éloigner ; par le motif, d’abord, qu’elle avait à remplir sa charge d’intendante du château ; puis, à qui aurait-elle pu, mieux qu’à sa mère, confier, en gouverne, la direction de son propre ménage et de ses enfants ?

Il ne lui fut point agréable de voir que grand’mère ressentait de l’ennui ; mais elle devina en même temps ce qui manquait à sa mère. C’est pourquoi dame Thérèse ne tarda pas à lui dire : « Je sais, maman, que vous êtes habituée à l’ouvrage, et qu’il vous ennuierait beaucoup de n’avoir qu’à faire sortir