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confier à un brave homme. On ne peut pas écrire tout sur un petit morceau de papier ; on voudrait demander ceci et cela ; mais à qui ? Au lieu que quand survient un homme du pays, ou un de ceux qui passent en pèlerinage, ils transmettent tout fidèlement et mot pour mot. J’aurais plus appris de cette manière par les nôtres ; mais à cause des troubles qu’il y avait alors, bien peu de notre monde osaient voyager.

« Le crépuscule commençait à se faire, quand j’arrivai au village avec mes enfants. C’était en été, et je savais que c’était l’heure du repos. J’entrai par derrière, à travers le verger, pour ne rencontrer personne. Les chiens accourent de notre ferme en aboyant après nous. Je les appelai mais ils aboyèrent encore davantage. Les larmes me coulaient, tant j’en avais de peine. Je ne pensais point qu’il y avait déjà quinze ans que j’étais partie, et que ce n’était plus les chiens qui m’avaient connue autrefois. Au verger, on avait planté beaucoup de jeunes arbres ; la haie était renouvelée ; la grange, couverte d’un toit neuf ; mais le poirier sous lequel je m’asseyais avec Georges, avait été frappé de la foudre : la cime en était abattue. Rien n’était changé à la chaumière voisine que mon père avait reçue en réserve de la défunte Novotna ; celle-là même qui faisait des couvertures, et dont le fils n’avait été autre que défunt mon mari. À la chaumière était attenant un petit jardin. La défunte y avait toujours eu du persil, des oignons, quelques pieds de menthe crépue, de la sauge, de ces plantes dont on a besoin dans un ménage ; elle aimait les épices