Page:Božena Němcová Grand-mère 1880.djvu/134

Cette page n’a pas encore été corrigée
— 124 —

furent partis, la princesse saisit la clochette d’argent qui était sur la table et sonna. Le valet de chambre, Léopold, reparut au même instant à la porte. La princesse lui mandait de faire servir le déjeûner dans le salon, et lui remit un paquet de lettres à expédier à leur adresse, Léopold s’inclina et se retira.

Pendant que la princesse lui donnait ses ordres, grand’mère examinait les tableaux appendus au mur en face d’elle.

« Mon Dieu ! » dit-elle, quand le valet de chambre fut parti, quels singuliers visages, et que les modes d’alors étaient différentes ! Voici une dame qui est costumée de la même manière que la défunte madame Halasek, Dieu lui donne le ciel ! Elle portait aussi de hauts talons, les jupes relevées aux flancs et sur la tête une coiffure toute semblable à celle-ci. Son mari était conseiller à Dobruschka et quand nous sommes allés quelquefois à la fête patronale, nous les avons vus tous deux à l’église. Nos garçons la nommaient : « la poupée du pavot, » parce qu’elle en avait l’air avec ses jupes retroussées et ses cheveux poudrés ; car rien qu’à la voir, elle fait penser à un pavot dont on aurait, sens dessus dessous, retourné les pétales. Mais on disait alors que c’était la mode française. »

« Cette dame est ma grand’mère, » dit la princesse.

« Ah ! Mais pourquoi pas ? c’est une belle dame, » répondit grand’mère.

« À droite, c’est mon grand’père ; et à gauche, mon père, » continua la princesse, en montrant leurs portraits.