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MARIE-ANNA LA CANADIENNE

vahi par une émotion grandissante, violente et délicieuse, une émotion d’extase !

Imaginez en m’écoutant, une mer infinie et calme, d’une blancheur laiteuse, mate, sans éclat, de laquelle émergeraient çà et là, de hautes crêtes de montagnes. Le soleil dardait ses rayons les plus vifs sur cette immensité. Quelques cimes se distinguaient au loin dans l’horizon grisâtre. À mes pieds, sur les flancs de la Haute-Pile un frisson de vent soulevait quelques vagues de cet océan de brouillard comme des frisures légères et capricieuses. Le village était submergé par la brume ; la pointe du clocher disparaissait comme le dernier mât d’un navire englouti.

J’aspirai de toute la force de mes sens les délices de cette vue magnifique et d’instinct où je ne sais par quelle suite de réflexions intérieures, je pensai à Dieu. Ce que j’avais devant moi dépassait en grandeur tout ce que le génie humain peut concevoir et pourtant, l’homme a quelquefois effleuré la perfection dans la recherche du beau, mais je me disais qu’une puissance de conception divine pouvait seule jouer ainsi avec les éléments et en faire jaillir une pareille masse de splendeurs. Que ceux qu’un doute tourmente, que ceux