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MARIE-ANNA LA CANADIENNE

— Quelles impressions vous ont laissées vos voyages ? demanda Marie-Anna intéressée.

— Ma foi, je vous avoue que c’est un peu confus. Il y a un joli mélange. Tout ce que je pourrai vous dire vous fera l’effet d’une bouteille d’encre renversée sous vos yeux. Les pays les plus beaux renferment parfois les mœurs les plus intolérables ; on voit l’idéal toucher la matière sans que celle-ci s’améliore au contact ; c’est à faire traiter d’ironies les plus beaux exemples de l’harmonie des contrastes. Le voyageur tend continuellement sa curiosité, ses désirs vers des beautés nouvelles et se heurte bien souvent à la laideur ; les bouges de Naples sont au bord du plus merveilleux golfe et sous le plus beau ciel du monde… De tout cela, que reste-t-il dans la mémoire ? Un véritable tourbillon de noir, de rouge et de bleu !… Quand je vous le disais, que c’était la bouteille à l’encre !

Marie-Anna sourit.

— Ne pouvez-vous prendre les fleurs et rejeter la fange ? demanda-t-elle.

— La métaphore sent les jardins arabes, fit Jacques en souriant à son tour. C’est facile assurément d’oublier des horreurs entrevues dès qu’on