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MARIE-ANNA LA CANADIENNE

peut. D’abord, le duel prouvera que l’un de nous est plus ou moins habile à tuer son semblable et rien autre chose. Ensuite, je vous l’avoue sans honte, je n’ai jamais touché une arme de ma vie ; vous auriez trop bon marché de moi. En acceptant le duel, je chargerais votre conscience d’un véritable assassinat dont vous auriez à répondre devant les hommes et devant Dieu. Enfin je serais bien sot de me battre avec la certitude d’être tué. Vous oubliez que vous n’êtes pas en France, ici ; libre à vous de pourfendre vos rivaux dans votre pays de sabreurs, mais au Canada, on ne se tue pas, on s’explique !…

Villodin l’écoutait, droit, les poings sur les hanches, le regard haineux, les lèvres retroussées par le plus insultant dédain. Son maintien, à lui seul, eut été suffisant à provoquer un choc. Il contenait son impatience et laissait passer ce flot de paroles comme si elles ne lui étaient pas adressées, ne voyant qu’une chose, le duel qu’il avait résolu. « Parle, parle toujours ; pensait-il. Tu chanteras tout-à-l’heure ! » Toute sa personne trahissait un désir effréné de vengeance et de meurtre. On sentait