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MARIE-ANNA LA CANADIENNE

Profondément touchée par les larmes de son fils mais sentant par-dessus tout l’égarement de sa passion, elle fit taire la voix de la pitié afin de combattre d’une manière plus efficace les espoirs irréalisables du jeune amoureux et pour le ramener à des voies plus sûres.

— Mon pauvre Jacques, il ne m’appartient pas de te donner cette autorisation, dit-elle. C’est à ton père qu’il faut la demander. Mais, crois-moi, s’il en est temps encore, oublie cette jeune fille. Le comte a des vues très hautes sur ton avenir ; il veut pour toi une riche alliance dans le monde digne de notre nom. Je doute qu’il consente à te laisser prendre ailleurs, dans une société étrangère, celle qui sera ta femme.

Jacques écoutait parler sa mère, les coudes sur les genoux, l’œil fixe et humide, les sourcils contractés, comme une statue vivante de la désolation. La comtesse comprit qu’il était bien enferré irrévocablement quand il lui dit d’une voix tremblante et dure :

— J’ignore les volontés du comte, mais je ne puis croire qu’il m’obligera à prendre une femme que je ne saurais aimer. La fortune et les titres que d’autres ambitionnent ne m’inspirent