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MARIE-ANNA LA CANADIENNE

amoureuse. Il appelait cela « trouver son ami noyé dans le bleu pâle, le rose nananne et le gris de Payne. » Tout commerçant qu’il fût devenu Gilbert Sansonnet n’en était pas moins resté le garçon d’esprit et l’éternel railleur des beaux jours canadiens.

Jacques aimait à le voir. Il était le seul être près duquel il put s’entretenir de Marie-Anna. Gilbert, avec sa complaisance brusque se prêtait volontiers à cette conversation, lui donnant à sa guise un tour gai ou sérieux selon les dispositions de son ami.

— Montre-moi tes anecdotes, lui dit-il un jour. Voyons où tu en es de ce grand voyage.

Jacques sourit tristement.

— J’en suis encore à Rézenlieu ! fit-il tristement. Je n’ai rien écrit.

Gilbert eut un plissement des lèvres comme un maître mécontent de son élève.

— Que fais-tu de tes journées, paresseux ?

— Je pense à « elle » et je te jure Gilbert, qu’il ne me reste pas une minute pour écrire.

— Ah ça, mon petit vicomte, c’est de la folie, tout simplement. C’est du suicide ! Après six mois de ce régime-là tu seras sec et jaune comme