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voyez le coup qu’ils vous ont déjà ménagé. Vous en verrez bien d’autres. Vous êtes, dès à présent, leurs prisonniers. Cette opération-là, cette opération de grève, c’est eux qui l’ont déclenchée pour vous mettre en difficulté, ou pour mettre déjà la main sur vous. »

On est allé plus loin. On est allé jusqu’à soupçonner la C.G.T. elle-même, jusqu’à dire : « La C.G.T. ne se contente pas de refuser sa collaboration ministérielle au Parti Socialiste, mais voilà déjà qu’elle lui joue un mauvais tour, pour mieux lui faire sentir sa puissance. »

Des hommes comme vous, vivant côte à côte et cœur à cœur avec la classe ouvrière, habitués à pénétrer tout le problème de la vie et de la lutte ouvrière, savent que cela n’est pas. Il est cependant nécessaire de rétablir la vérité.

D’abord dans les faits. On a évoqué l’exemple tout récent de l’Espagne, l’exemple beaucoup plus lointain de l’Italie. On a parlé d’usines prises d’assaut. Il n’y a pas eu appropriation des usines par la classe ouvrière. Il y a eu occupation des lieux de travail par les ouvriers en grève. Cette tactique, elle n’est pas aussi nouvelle qu’on l’a cru. Elle a été déjà appliquée, par exemple, voici des mois, dans la région du Nord. Elle répond à une des particularités de la bataille ouvrière en période de chômage. C’est qu’en période de chômage, le lock-out est facile et qu’il est toujours possible aux patrons de remplacer, par cette demande de travail surabondante qui s’installe partout, les ouvriers en grève.

Mais enfin, cela ne touche qu’à des explications de fait, et je voudrais devant vous — car ce sont des choses qu’il faut que nous examinions entre nous — toucher plus à fond le problème.

Ce qu’il est nécessaire que nous comprenions bien, pour le faire comprendre autour de nous, c’est qu’il est et qu’il sera toujours impossible à la