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tent le terme qu’ils s’étaient eux-mêmes fixés pour cette dévaluation à laquelle nous avons toujours été, à laquelle nous restons résolument hostiles. La spéculation, la menace de la dévaluation, attirent après elles tous les calculs égoïstes et vils de ceux qui veulent tirer leur épingle du jeu. L’égoïsme consiste dans le désir de se prémunir contre le sort commun que l’on redoute, et la vilenie, elle, consiste dans la rupture de cette solidarité qui devrait unir tous les membres d’une même nation contre les mêmes risques.

Mais enfin, malgré tout, depuis la victoire électorale du Front Populaire, un élément nouveau s’est ajouté ; il s’est créé, ou l’on a créé une alarme qui pourrait devenir une panique et là-dessus, je veux aussi m’expliquer devant vous et devant les journalistes qui nous écoutent.

Je ne veux pas chercher longuement les causes. Il est possible que, depuis les élections, certaines campagnes se soient produites ; je n’en sais rien. Mais avant et pendant la période électorale, vous savez en quels termes on a fait mener la bataille contre nous. On a dit, on a répété, on a affiché sur tous les murs, on a proclamé dans tous les tracts que l’on distribuait par millions, que le Front Populaire, ce serait la guerre civile, ce serait la guerre étrangère ; on a usé et abusé de l’exemple dénaturé de l’Espagne ; on a montré d’avance la France à feu et à sang, car ce n’était pas seulement le couteau entre les dents que l’on placardait, c’était la torche à la main. On vous a montré les foyers violés, le pillage, le rapt, et voilà le spectacle avec lequel on s’est efforcé d’épouvanter l’opinion.

Eh bien, quelle est donc la réalité ? La réalité, c’est que la France est une République, c’est qu’en République la loi suprême est la loi de la majorité exprimée par le suffrage universel ; c’est qu’un gouvernement de Front Populaire va accéder au pouvoir de la façon la plus normale, la plus légale,