Page:Blum - L’Exercice du pouvoir, 1937.djvu/280

Cette page a été validée par deux contributeurs.

nal, qui est le secret de la conscience. Salengro est acquitté. Il est définitivement acquitté, bien que contumax. Cela doit valoir et durer pour la vie entière.

En effet, sauf quelques incidents très vite réglés au cours d’une période électorale, vingt ans de silence s’écoulent.

Et tout à coup voici qu’une légende vraiment monstrueuse se forme, se développe, apparaît : Salengro a été acquitté, soit ! Mais, dit-on, il a été acquitté après une première condamnation.

Bien entendu, comme toutes les légendes, comme tous les mythes, celui-ci varie et se diversifie, parce que tout mythe est par essence multiforme. Pour les uns, Salengro a bien été acquitté, le 20 janvier 1916, mais il aurait été condamné auparavant, très peu de temps après sa disparition ; et l’on fait état, pour justifier cette conjoncture, de l’espace de temps anormal, dit-on, qui s’est écoulé entre la disparition et la comparution devant le Conseil de guerre. Pour les autres, il aurait été, au contraire, condamné le 20 janvier 1916, et il aurait été acquitté beaucoup plus tard, à la fin de la guerre, après une sentence de revision, par un Conseil de guerre du Gouvernement militaire de Paris.

Mais, messieurs, le fonds commun du mythe et de la légende sous leurs diverses formes, c’est l’existence d’une première sentence de condamnation qui aurait été cassée, ou revisée, dans des conditions que, d’ailleurs, on ne précise pas autrement et qui aurait été suivie d’une sentence d’acquittement devenant, par cela même, suspecte. C’est cela, messieurs, le fond de la légende.

Peut-être n’a-t-elle pas trouvé une très grande place dans le discours que vous venez d’entendre ; car cette articulation qui est l’articulation fondamentale, qui est à la base de la campagne dirigée