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Rien ne s’était donc passé entre le 18 octobre et le 17 novembre.

Mais, le 17 novembre, l’affaire changeait de face. Que s’était-il produit ? Le commandant Arnould avait appris, dans des circonstances d’ailleurs assez romanesques, que le soldat Salengro était vivant.

Vous vous souvenez, car ce détail est consigné dans la déposition du lieutenant Deron, qu’en quittant la tranchée, Salengro avait déposé son équipement. Or, on avait trouvé quelques papiers dans sa cartouchière et l’un d’eux portait l’adresse de la marraine de guerre de Salengro, qui habitait Paris.

Je ne crois pas qu’il soit nécessaire de citer ici le nom de cette marraine qui était une femme d’une très haute honorabilité. Elle a été interrogée, comme on vous l’a dit, par commission rogatoire et elle a déclaré quelques semaines plus tard :

« C’est mon filleul de guerre. J’ai appris incidemment qu’il était des régions occupées et qu’il ne recevait ni lettres ni paquets. Je me suis offerte pour lui envoyer ce dont il pourrait avoir besoin. Je ne l’ai jamais vu. »

Ici, deux versions différentes dans le dossier, selon qu’on se réfère au rapport du 19 décembre du commandant Arnould, ou à sa déposition devant le conseil de guerre : dans son rapport le commandant Arnould dit qu’il a écrit alors à la marraine de guerre de Salengro ; devant le Conseil de guerre il a déclaré qu’il s’était trouvé en rapport indirect avec elle pendant une permission à Paris.

Toujours est-il que le commandant Arnould apprit alors d’elle qu’elle venait de recevoir des nouvelles de Roger Salengro, prisonnier au camp de Grafenwohr en Allemagne, près de la frontière de Bohême.

Ainsi Salengro était vivant. Et aussitôt, mes-