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Voilà essentiellement, mes chers amis, ce que je voulais vous dire. Mais, puisqu’il s’agit ici d’une réunion de journalistes du Parti, je voudrais à mon tour, après Gaillard et après Paul Faure, ajouter quelques mots sur ce problème de la presse qui tient, et dans notre Parti et dans l’ensemble de l’opinion publique, une place sans cesse plus importante.

Paul Faure a dit une chose profonde et vraie, sur laquelle je veux insister encore. L’état actuel de la grande presse, croyez bien que les hommes sur qui parfois il pèse le plus cruellement, ce sont les journalistes eux-mêmes. Distinguez toujours, je vous en prie, entre les journaux et les journalistes.

Nous savons tous à quel dur déchirement de conscience sont parfois assujettis des hommes pour qui le journal est le métier, le gagne-pain de leur personne et de leur famille. Nous n’avons vraiment pas le droit de leur demander cette espèce de sacrifice héroïque qui consisterait à déchirer le contrat qui les lie à tel ou tel journal, parce que l’attitude politique imposée à ce journal heurte leurs convictions ou leur conscience. Il y a là un dur débat qui a été cruel pour beaucoup, qui l’est encore tous les jours, croyez-le bien, et qu’il ne faut pas que vous perdiez de vue. Les coupables de l’état actuel de la presse, ce ne sont pas ceux qui sont astreints et qui souvent sont contraints, mais ce sont ceux qui imposent.

Je voudrais vous faire part encore d’une réflexion qui m’est venue bien souvent à l’esprit. Savez-vous quelle est peut-être la conséquence la plus redoutable de cette sorte de dégradation de la grande presse dont parlait Paul Faure tout à l’heure ? C’est que par là elle perd peu à peu son