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gime est la République et où, par conséquent, la volonté du suffrage universel fait loi, il n’était au pouvoir de personne de revenir, sous une forme quelconque, à la politique de déflation. Bonne ou mauvaise, elle était condamnée par le suffrage universel et elle était devenue impossible.

Messieurs, puis-je vous dire, pendant cette période, assez étrange à certains égards, qui s’est écoulée avant que nous nous installions au pouvoir, pendant ce mois où, suivant l’expression charmante de mon ami, M. Paul Reynaud, j’étais « un dauphin couronné », puis-je vous dire toutes les pressions qui ont pu s’exercer autour du dauphin, ministre des Finances, et autour de moi-même, pour que, dès notre premier contact avec le Parlement, nous lui présentions un projet de loi de dévaluation ?

Faut-il vous dire quels conseils nous sont venus de toutes parts ?

C’était le moment, vous vous en souvenez, où d’étranges conversions devenaient publiques, où la grâce avait brusquement touché des hommes politiques, des théoriciens fameux, de grands journaux.

On nous disait :

« Quelle chance vous avez ! Vous allez pouvoir dévaluer tout de suite. Toutes vos difficultés vont se trouver résolues en un clin d’œil. Pour vous, plus de questions de budget, plus de questions de trésorerie. Vos plans de réformes sociales, vos programmes de grands travaux pour résorber le chômage, vont être aussitôt alimentés par une caisse abondante, par le reflux des capitaux. »

Si je pouvais dire à la Chambre de quelles bouches nous sont venus à ce moment de semblables avis, de semblables conseils, prenant parfois la forme d’une pression amicale…

On ajoutait, et Vincent Auriol doit se souvenir de ces propos qui prennent aujourd’hui pour lui et pour moi une saveur particulière :

« Faites donc la dévaluation tout de suite ! Si