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tion du sentiment patriotique qu’on peut aujourd’hui assurer la paix.

Mes amis, mes amis !… Je connais ce langage, je l’ai déjà entendu.

Je suis un Français — car je suis Français — fier de son pays, fier de son histoire, nourri autant que quiconque, malgré ma race, de sa tradition. Je ne consentirai à rien qui altère la dignité de la France républicaine, de la France du Front Populaire. Je ne négligerai rien pour assurer la sécurité de sa défense. Mais, quand nous parlons de dignité nationale, de fierté nationale, d’honneur national, oublierons-nous, les uns et les autres, que, par une propagande incessante depuis quinze ans, nous avons appris à ce peuple qu’un des éléments constitutifs nécessaires de l’honneur national était la volonté pacifique.

Est-ce que nous lui laisserons oublier que la garantie peut-être la plus solide de la sécurité matérielle, il la trouvera dans les engagements internationaux, dans l’organisation internationale de l’assistance et du désarmement ? Est-ce que nous avons oublié cela ? Je crois que vous ne l’avez pas oublié. En tout cas, moi, je vous le répète, j’ai vécu trop près d’un homme et j’ai reçu trop profondément en moi son enseignement, j’ai gardé trop présent et trop vivant devant mes yeux le souvenir et le spectacle de certaines heures… j’ai tout cela en moi trop profondément pour l’oublier jamais, et y manquer jamais.

Tout ce qui resserre entre Français le sentiment de la solidarité vis-à-vis d’un danger possible, je le conçois. Mais l’excitation du sentiment patriotique, mais l’espèce de rassemblement préventif en vue d’un conflit qu’au fond de soi on considère comme fatal et inévitable, cela non ! Pour cela, il n’y aura jamais, je le dis tout haut, à tout risque, ni mon concours, ni mon aveu. Je ne crois pas, je n’admettrai jamais que la guerre soit inévitable et