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encore : la trahir en fait, sans avoir le courage de la retirer.

Je vous le répète : impossible à mes yeux, — et je parle, cette fois, à la première personne, — impossible à mes yeux en l’heure présente d’agir autrement. Impossible d’agir autrement sans ouvrir en Europe une crise dont il serait difficile, ou dont il serait malheureusement trop facile, de prévoir les conséquences.

Maintenant, je veux conclure. J’ai, je peux le dire, évité le pouvoir de mon mieux pendant une assez longue suite d’années. Je l’exerce aujourd’hui dans des conditions qui ne peuvent guère faire envie à personne, et vous savez, moi, quand je dis cela, c’est vrai !

J’ai deux devoirs à remplir : un devoir à remplir envers le Parti dont je suis le délégué au Gouvernement, et j’ai, comme chef de Gouvernement, à remplir un devoir vis-à-vis de la collectivité nationale envers laquelle, nous, Parti, nous avons contracté des obligations.

Le jour où je ne pourrais plus concilier ces deux devoirs, le jour où je ne pourrais plus, sans manquer à ma solidarité disciplinée à l’égard de mon Parti, pourvoir aux grands intérêts nationaux dont j’ai la charge, ce jour-là, le pouvoir pour moi deviendrait impossible.

J’ajoute encore quelque chose. Je suis au Gouvernement, non pas à la tête d’un cabinet socialiste, non pas à la tête d’un cabinet prolétarien, mais à la tête d’un Gouvernement de coalition dont le contrat a été formé par le programme commun du Rassemblement Populaire. Le programme de notre Gouvernement est le programme du Front Populaire, déjà exécuté pour une large part dans la direction de la politique quotidienne intérieure ou extérieure.