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est révolutionnaire, c’est la paix qui est révolutionnaire ! »

Chez Jaurès, la marque propre du génie était de concilier des vues, des pensées, des systèmes, qu’une première vue, qu’une vue trop superficielle, et trop rapide, pouvait faire apparaître comme contradictoires. Il faut que vous compreniez bien comment, chez Jaurès, cette sorte de contraction devant la guerre pouvait cependant, logiquement, harmonieusement se concilier avec la pensée de la défense de la patrie, de la défense du sol national.

Là-dessus aussi, nous sommes tous d’accord aujourd’hui Il n’y a plus aucune divergence, aucune discordance à ce sujet. Celles mêmes qui pouvaient apparaître entre certains de nos amis prolétariens et nous, il y a un an, se sont effacées. Et nous reconnaissons que, pour le prolétariat, le devoir de défense nationale peut coïncider avec son devoir de classe et avec son devoir de solidarité internationale.

Au moment où la pensée de Jaurès a commencé à pénétrer les masses populaires, il n’en était pas universellement ainsi. C’est de cette époque que date, au contraire, la pensée — qui elle non plus n’est pas complètement éteinte aujourd’hui — que le devoir du prolétariat, en cas de conflit international, peut être de se refuser à la défense du sol pour se réserver en vue de conjonctures révolutionnaires.

Mais vous vous rappelez comment dans l’Armée Nouvelle, Jaurès interprétait, avec une clairvoyance entière la formule célèbre du Manifeste Communiste. Vous vous rappelez la phrase de Jaurès : « Oui, les prolétaires n’ont pas à défendre une patrie quand ils n’en ont pas. Mais ils ont à s’en