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cataclysmes nationaux produits par la guerre que le socialisme révolutionnaire trouverait sa meilleure chance de s’installer en Europe et dans le monde. Cette pensée a des origines très lointaines, car elle nous vient de la Révolution de 1789. Rappelez-vous les grandes formules historiques ; rappelez-vous la déclaration des Droits de l’Homme, portée en Europe à la pointe des baïonnettes ; rappelez-vous la Marseillaise ; rappelez-vous les vers de Bérenger…

Cette libération universelle par la guerre, cet éveil des peuples par la guerre, pendant un siècle, dans l’Europe entière, la pensée révolutionnaire l’a envisagée.

On citait souvent la parole du poète polonais Mickiewicz : « Et la grande guerre pour la libération des peuples, donnez-la-nous ».

L’Europe a pensé cela longtemps, et si elle pense aujourd’hui autre chose, c’est peut-être à Jaurès qu’elle le doit.

Quand Jaurès, battu à Carmaux après les événements de 1898, commença à travailler à son Histoire de la Révolution, il découvrit dans des archives et dans les procès-verbaux de la Législative, les traces d’une grande lutte entre les Girondins et Robespierre.

L’idée de la guerre, de la guerre systématique, attendue pour la libération de l’Europe, pour la chute des tyrannies — c’était le mot d’alors, aujourd’hui nous en avons un autre, — ce sont les Girondins qui la défendaient à la tribune de la Législative. Et c’est Robespierre, — qui n’était pas membre de la Législative parce qu’il avait été de la Constituante et que les Constituants n’avaient pas été rééligibles, — c’est Robespierre qui leur disait ce que Jaurès n’a cessé de répéter : « Non, non, pas de guerre ! On sait comment une guerre commence, on ne sait jamais comment une guerre finit. On ne sait jamais, dans une guerre, qui on délivre et qui