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étaient d’autant plus obligées de la soutenir, qu’elle était menée contre elles.

Oh ! messieurs, j’ai assisté ce matin à des dialogues échangés entre M. Paulin, qui prononçait du haut de cette tribune, un si noble et si beau discours, et quelques-uns d’entre vous. Ne niez pas, parce qu’il ne faut jamais nier la vérité, que, pendant de longues années, les organisations syndicales et leurs militants et leurs organisateurs ont été l’objet de l’hostilité et de l’animosité d’une très grande partie du patronat. C’est un fait.

Pendant les négociations qui ont eu lieu à l’hôtel Matignon, dans des circonstances que je voudrais qu’on n’oubliât pas trop vite, j’ai entendu, entre les délégués du patronat et des représentants ouvriers, des échanges de confidences dialoguées dont l’accent est encore présent à ma mémoire.

J’ai entendu les délégués ouvriers dire à de grands patrons, à quelques-uns des plus importants représentants du patronat dans ce pays :

« Si la situation est aujourd’hui ce qu’elle est… » — et vous vous rappelez ce qu’elle était — « …rendez-vous compte que cela tient pour une large part à ce que nos organisations syndicales ne sont pas plus fortes, et, si elles ne sont pas plus fortes, à qui la faute ? N’est-ce pas votre faute à vous représentants du patronat, qui pendant tant d’années avez brisé nos efforts et témoigné de l’hostilité à l’égard de nos militants ? »

Et j’ai entendu, de mes oreilles, quelques-uns des hommes qui sont les représentants les plus puissants et les plus intelligents du patronat dans ce pays dire : « Oui, c’est vrai, nous avons eu tort et nous nous en rendons compte aujourd’hui. »

Vous êtes aujourd’hui, messieurs, en présence d’un état d’esprit différent et dont tous ici, vous devriez vous réjouir, comme l’a fait tout à l’heure, avec ce qu’il y a toujours de noble et d’altier dans sa pensée, notre collègue M. Paul Reynaud.